Musée des Beaux-arts de Caen - Caen, Calvados, France
Gustave Le GRAY - « La grande vague, Cette » [mer : Sète ; ciel : Normandie], 1857. Épreuve sur papier albuminé ciré d’après deux négatifs au collodion sur verre, image 34,2x41,4 cm (image) ; 39.7x50 cm (support). frSFP_0243im_EP_0002
Bien que fabuleux, car impossible à rejoindre, l’horizon est un repère stable et fixe pour tous les observateurs, qu’ils soient astronomes, navigateurs, voyageurs ou artistes. À chacun des grands moments de la pensée, il est revenu dans le champ du savoir. Depuis la Renaissance, entre imaginaire et réalité, les artistes n’ont cessé de nous rendre sensibles aux nombreux paradoxes de l’horizon, impliquant la question de la perception, de la représentation et du partage de l’espace. S’il se matérialise par une ligne, l’horizon se déplace avec nous, peut se dissoudre dans le brouillard ou la tempête : il nous indique que le monde se poursuit au-delà de ce que nous en percevons. Qui n’a pas la hantise d’un monde dépourvu d’horizon ? Qu’il donne l’illusion de la profondeur et unifie l’espace représenté, qu’il paraisse ouvrir la vue à l’infini, qu’il s’élève tel un barrage tranchant ou qu’il nous renseigne sur le rapport de l’homme à l’autre, l’horizon nous fournit les repères essentiels dont notre vision a besoin et fonde notre expérience du monde.
Depuis l’invention de la perspective à la Renaissance jusqu’aux œuvres numériques les plus contemporaines, l’art explore notre rapport à l’horizon à travers des supports de plus en plus diversifiés. S’ouvrant avec le Mariage de la Vierge du Pérugin (1504), fleuron des collections du musée au centre duquel se découpe l’horizon du paysage, l’exposition présente une centaine d’œuvres datant du 16e au 21e siècle, signées Albrecht Dürer, Joachim Patinir, Caspar-David Friedrich, Gustave Courbet, Anna-Eva Bergman, Jan Dibbets, Hiroshi Sugimoto, Sophie Ristelhueber, Elina Brotherus, Tania Mouraud, Tacita Dean, Capucine Vever... Aux tableaux, dessins, gravures, installations et vidéographies présentés, se mêle un ensemble unique de traités de perspective parus du 16e au 19e siècle, dans leurs éditions les plus rares. Symboliques, plastiques, politiques ou poétiques, les œuvres présentées dessinent un parcours inédit dans les espaces du musée, depuis les salles d’exposition jusqu’au cœur des collections permanentes où s’ouvrent les devenirs abstraits de l’horizon.
À l’heure où le monde semble être mis à plat par les communications en réseau, à l’heure où des milliardaires mettent en jeu des sommes faramineuses pour quitter l’horizon terrestre, il est important de reconsidérer la portée de l’horizon dans ses dimensions existentielle, imaginaire, matérielle et sensible.